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  • Julia Lemonnier

Matthieu Penet : "Il faut accompagner les services de recrutement et considérer le candidat."

Fondateur de YAGGO et CAASK, Matthieu Penet repense le processus de recrutement en analysant la relation candidat/recruteur et en rendant compte des profondes mutations qui ébranlent le secteur des ressources humaines.

Pourquoi vous êtes-vous spécialisé dans le domaine des ressources humaines ? Comment YAGGO et CAASK sont-ils nés ?


YAGGO est né d’un constat très pragmatique. Tandis que les entreprises dépensent beaucoup d’argent pour attirer des candidats, il existe une vraie dissonance avec l’expérience candidat. En effet, l’absence de réponse ou les réponses automatisées sont sources de déception pour celui qui postule. Les candidats sont ulcérés quand ils n’ont pas de réponse du recruteur parce qu’ils jugent autant l’entreprise sur sa capacité à avoir des produits et des services intéressants que sur ses engagements sociétaux. En d’autres termes, cette négligence crée une défiance puisque le candidat se rend compte que les valeurs véhiculées par l’entreprise (respect, bienveillance, etc.) sont erronées. La défiance se dessine également dans la façon dont est perçu le recruteur. Le candidat et plus généralement l’opinion l’assimilent à « un grand méchant » incapable de considérer le postulant. Ainsi, la défiance se répercute au niveau du marché du travail. C’est la raison pour laquelle je me suis dit qu’il fallait accompagner les services de recrutement et proposer une offre qui considère humainement et individuellement le candidat.


“La logique de YAGGO vise à réconcilier candidats et recruteurs, en réparant humblement le recrutement en France sur des enjeux de volume qui commencent à être intéressants.”

Premièrement, YAGGO formule une réponse personnelle en marque blanche à chaque candidat non retenu. Ce procédé montre au postulant toute la considération et le respect qu’il attendait en tant qu’humain. Ainsi, YAGGO se greffe directement au processus de recrutement pour être capable d’offrir une réponse personnalisée et des conseils. Par exemple, YAGGO aide le candidat à appréhender l’angoissante recherche d’emploi ou encore à améliorer son CV afin qu’il maximise ses chances de réussite. Même si les candidats n’ont pas été embauchés, ils ressortent avec une plus-value et le sentiment d’avoir été estimés.


Deuxièmement, YAGGO permet aux entreprises de rentabiliser les candidatures reçues. En effet, YAGGO maintient le contact entre l’entreprise et les profils pertinents pour anticiper les enjeux de recrutement à venir. En ventilant les candidats par viviers, la fidélisation des profils est entretenue. Régulièrement sont envoyées des campagnes de fidélisation et des offres individualisées (en fonction de la région, du profil et du contrat recherché par l’éventuel candidat). Cette logique de revalorisation permet aux clients de YAGGO de staffer un peu plus de 10% des postes à chaque campagne.


Ce faisant, en 2020, YAGGO a répondu à 630 000 personnes. L’objectif pour 2021 avoisine les 1,2 million de personnes. La considération humaine et individuelle des candidats a un triple impact : au niveau de la société, du business et de l’image de l’entreprise. Par conséquent, la logique de YAGGO vise à réconcilier ces deux entités, en réparant humblement le recrutement en France sur des enjeux de volume qui commencent à être intéressants.


La logique de CAASK est sensiblement la même. Il s’agit de demander au candidat un feed-back sur le processus de recrutement et sur son ressenti. De ce fait, les équipes de recrutement bénéficient de plus de lisibilité sur les attentes des candidats et sur les éventuels points d’amélioration à apporter.


Que pensez-vous de l’essor du recrutement sans CV ? Êtes-vous un adepte de la lettre de motivation jointe au CV ou avez-vous une vision plus révolutionnaire du recrutement ? Le recruteur peut-il se fonder sur ces deux traces écrites pour convoquer le candidat à un entretien ?


Selon moi, deux points se détachent. D’un point de vue pragmatique, il paraît difficile de mettre uniquement des compétences humaines sur un CV. Bien entendu, cela vaut le coup d’avoir un aperçu de ces valeurs lorsqu’on postule pour un emploi dans la grande distribution ou dans la relation client parce que les compétences humaines y jouent un rôle non négligeable. Néanmoins, les équipes de recrutement ont toujours besoin de consulter un format avant un entretien, et le CV s’y prête bien. Avoir une sorte de résumé de la vie du candidat sert de base de discussion. Je ne crois pas à la mort du CV parce qu’il contient des informations nécessaires en vue d’établir une relation de confiance. Néanmoins, je crois aux données supplémentaires pour avoir un aperçu des qualités humaines du postulant. D’un point de vue opérationnel, les recruteurs n’ont pas toujours le temps de regarder une vidéo de présentation et d’investir 10 minutes dans l’étude du profil d’un seul candidat. Si un recruteur visionnait 6 000 vidéos par an de 5 minutes, il ne ferait que ça ! Ainsi ces deux visions montrent l’importance du CV, même s’il faut l’augmenter et le faire évoluer.


Comment un recruteur peut-il s’assurer qu’un entretien d’embauche est concluant ?


Le recruteur a des méthodes à acquérir en vue de structurer l’entretien et faire en sorte d’évaluer des points précis indépendants de son ressenti. Avoir une trame d’entretien et une grille de lecture permettent alors de construire la démarche de recrutement et de lisser les items attendus. Procéder ainsi vise à limiter les biais de lecture du recruteur et à le rendre plus objectif. L’enjeu est double : avoir un socle commun permet d’arrêter la comparaison entre deux candidats radicalement opposés et de pouvoir sélectionner celui qui correspond le mieux au poste. D’un point de vue « ressenti candidat », il est davantage en mesure de faire un retour constructif sur l’entretien avec cette approche. En bref, pour mener un bon entretien il faut savoir être méthodique. De cette marche à suivre découlent deux impacts : la clairvoyance du recruteur et la capacité à faire un feedback.


Que faire pour améliorer le processus de recrutement d’aujourd’hui ? Davantage de personnalisation ?


Il y a eu pendant longtemps une défiance du marché de l’emploi. Encore aujourd’hui, plus de 5 millions de Français sont des demandeurs d’emploi et beaucoup d’entreprises ne parviennent pas à recruter. Selon moi, les efforts sont à faire des deux côtés pour pallier cette inadéquation au marché du travail et ce manque de compréhension entre candidats et recruteurs. Tout d’abord, il semble nécessaire d’améliorer la communication et la personnalisation du processus de recrutement. Ensuite, les candidats doivent s’inscrire dans une logique d’ouverture d’esprit. Je m’explique : une offre d’emploi peut être intéressante même si elle ne correspond pas à notre idée de départ. Celui qui recherche un emploi doit être prêt à échanger avec des recruteurs pour mûrir son projet professionnel. En somme, je dirais qu’un échange doit se mettre en place. Il ne faut pas se contenter d’une relation où le candidat méprise le recruteur et réciproquement. L’axe de travail est plutôt là.


“Actuellement, on tente de faire prendre conscience aux entreprises que considérer un candidat c’est un levier de différenciation capital.”

Comment le paysage du recrutement, très sensible aux variations économiques, s’est-il recomposé avec la pandémie ?


Avec la pandémie, les attentes du candidat ont radicalement évolué. Des études montrent que, pour les postulants, les valeurs de l’entreprise sont aussi importantes que le salaire. C’est un élément extrêmement différenciant. Par exemple, il est possible que je préfère travailler pour l’entreprise A, plutôt que pour l’entreprise B parce que mon système de valeurs est plus en accord avec cette société (respect de l’environnement, des employés, des enjeux sociaux, etc.) ou parce que ce que j’entends sur le management de l’entreprise A me satisfait davantage.


La crise sanitaire a également engendré des pénuries drastiques dans certains secteurs d’activité, comme l’hôtellerie ou la restauration. Avec la pandémie, beaucoup d’employés en chômage technique ont eu le temps de réfléchir sur la pérennité et le confort de leur emploi, et ont décidé de ne pas reprendre le chemin du travail. Ainsi, la crise a participé à la création de nouveaux fossés dans le monde du travail : entre les sociétés qui attirent des candidats et celles qui n’y parviennent pas. Certains pans de l’économie ont du mal à redémarrer, faute de profils.


Côté recruteurs, la pandémie a été catalyseur d’une prise de conscience : comment mieux considérer le candidat ?


Selon vous, quel serait l’avenir des plateformes d’aide au recrutement comme YAGGO ?


YAGGO est une entreprise qui vient pallier un problème, qui ne devrait pas exister, parce que dans un monde idéal tous les recruteurs devraient répondre correctement aux candidats. Seulement, le travail d’un recruteur est suffisamment dur et prenant, qu’il n’a pas le temps de se concentrer sur tous les candidats non retenus. Malheureusement, cela creuse encore plus le manque de considération entre les candidats et les recruteurs.


“YAGGO est une entreprise qui vient pallier un problème, qui ne devrait pas exister, parce que dans un monde idéal tous les recruteurs devraient répondre correctement aux candidats.”

Un jour, toutes les entreprises seront obligées de répondre à leurs candidats, qu’ils le fassent avec ou sans YAGGO. Cela va devenir une norme. Actuellement, on tente de faire prendre conscience aux entreprises que considérer un candidat c’est un levier de différenciation capital. Derrière le travail de YAGGO, il y a un impact : 1,2 million de candidats et 10% de postes staffés avec des profils revalorisés. Cette mission, certaines entreprises la remplissent avec nous, d’autres le font seules mais dans tous les cas ce processus leur permet de gagner de l’argent et de fluidifier leur process de recrutement.


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