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  • Sara Durier

Gaspard Schmitt : “Choisir d’allier humain et digital dans le recrutement”


Le fondateur de Side -plateforme française d’intérim en ligne- appelle le secteur de l’emploi et du recrutement, notamment les nouvelles plateformes de travail, à adopter un modèle plus responsable et respectueux du droit du travail.


En 2016, vous fondez votre entreprise Side. Pourquoi vous êtes-vous lancé dans l’entreprenariat, en particulier dans le secteur de l’intérim, qui rassemble aujourd’hui 2 à 3% de l’emploi salarié en France ?


J’ai toujours désiré entreprendre, je ne me voyais pas faire autre chose. Tout au long de mes études, j’ai suivi de près des entrepreneurs inspirants et des cours dédiés, bien qu’il soit difficile d’enseigner l’entrepreneuriat. Le mieux, c’est de le pratiquer ! À l'issue de ma formation, j’ai fait la rencontre de trois personnes, désireuses de monter un projet ensemble. Nous avons choisi d’investir le secteur du travail temporaire, car comme beaucoup d’étudiants, nous avions travaillé pendant nos études en intérim, en CDD ou en freelance. Nous partagions alors le même constat :


“Il est difficile de trouver un job autour de chez soi, savoir combien on va être payé et gérer toute la partie administrative. Entre 2010 et 2015, toutes ces étapes se faisaient encore manuellement."

En créant l’application Side, nous voulions simplifier ces procédures, pour qu’elles deviennent plus claires et intuitives grâce au digital. Side a donc d’abord été créé pour transformer l’expérience candidat, mais très vite l’application est venue soutenir le recrutement des entreprises. Nous avons ainsi réalisé à quel point ce service pouvait intéresser des entreprises “traditionnelles”, notamment dans les secteurs de la logistique et du retail.

C’est en nous développant que nous avons fait irruption sur le marché florissant de l’intérim. En effet, en 2019, le chiffre d’affaires du secteur correspond à plus de 20 milliards d’euros. En France uniquement ! C’est aussi 2,5 millions d’intérimaires chaque année. L’intérim est un marché important, en termes de taille, de diversité des secteurs et de présence géographique. Aujourd’hui, l’intérim fait face à plusieurs défis de transformation que Side contribue à résoudre.


Sur le marché de l’emploi intérimaire, les recruteurs et les actifs seraient contraints et ralentis par l’ensemble des démarches administratives requises…


Pour les candidats, la digitalisation des quatre documents obligatoires -pièce d’identité, carte vitale, contrat de travail et fiche de paye- est venue contourner cette difficulté. Clairement, l’intégration des spécificités de rémunération reste très contraignante du côté des entreprises, car il y a beaucoup de règles différentes à prendre en compte. Side automatise ainsi cette partie via la plateforme.


En fluidifiant la mise en relation entre candidats et recruteurs, l’application Side offre aujourd’hui un service utile. Nous mettons particulièrement l’accent sur la qualité du matching pour proposer aux entreprises des profils qualifiés et proches du lieu des missions, et ainsi minimiser les risques de retard. Une telle sélection est possible parce que nous connaissons notre communauté de “Siders” (les candidats inscrits sur l’application), leurs envies professionnelles, leur localisation ou même leur moyen de locomotion…


Le matching, mis au point par Side pour affiner la pertinence des recrutements, repose-t-il sur l’utilisation d’une technologie d’intelligence artificielle (IA) ?


Nous n'utilisons pas l’IA mais une technologie basée sur l’algorithmie et la donnée. Toutefois, nous ne tenons pas à digitaliser la totalité du processus de mise en relation, car il y a une trop grande diversité dans les missions proposées ou dans les besoins des entreprises ! Nous ne trouvons finalement rien de mieux que l’humain pour s’assurer qu’il s’agit de la bonne personne pour la bonne mission, et vice versa.


“Je crois qu’il faut allier la technologie et l’expertise de recruteurs humains pour trouver la bonne correspondance entre talents et missions”.

Chez Side, la technologie permet à nos recruteurs de gagner du temps. Concrètement, l’application fait remonter des listes de profils présélectionnés, en fonction de différents critères : les “siders” disponibles, intéressés par le secteur de la mission, habitant dans un rayon géographique proche, avec des avis positifs de précédentes entreprises etc. Effectivement, il y a des données objectives qui permettent de considérer que certains talents seront plus qualifiés que d’autres pour la mission. Toutefois, nos recruteurs vérifient ensuite la compatibilité des profils présélectionnés avec l’entreprise.


Aujourd’hui, Side compte sur une quarantaine de professionnels, nécessaires pour apporter de la qualité de service. Honnêtement, nous avons tenté la sélection 100% automatisée et les essais n’étaient pas concluants. Même si les médias parlent beaucoup des vertus de l’intelligence artificielle dans de nombreux secteurs, j’ai des réserves dans celui du recrutement…


Selon vous, quelles sont les limites de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le recrutement ?


L’intelligence artificielle cerne difficilement les compétences soft skills, l’expérience terrain ou encore la connaissance d’une entreprise. Par exemple, dans le secteur de la logistique, chaque entreprise est différente et le poids des charges à porter ne sont pas toujours les mêmes… C’est pourquoi, avec Side, tous les candidats reçoivent un appel de notre équipe, dès le début de l’expérience, pour un entretien sur leurs motivations et leurs expériences. L’occasion également de faire des mises en situation pour évaluer la dimension soft skills.


Comment le paysage de l’intérim, très sensible aux variations économiques, s’est-il recomposé avec la pandémie ?


Notre agence offrait déjà un service 100% digital. Ainsi, rien n'a changé dans notre manière de qualifier nos profils ou de faire les sélections. C’est plutôt la nature des missions d’intérim proposées qui ont évolué. Ces nouvelles tendances nous permettent d’anticiper les secteurs porteurs de demain. En effet, certaines filières se sont fortement développées début 2020, tandis que d’autres ont subi un ralentissement. Fort de ce constat, nous essayons d’amener nos candidats vers les emplois du futur, afin qu’ils se forment et soient les plus employables possibles sur le long terme, notamment dans les domaines de la mobilité douce et du e-commerce alimentaire. On assiste à un véritable développement des compétences ! Par exemple, de plus en plus de profils connaissent mieux aujourd’hui les fruits et légumes, ou encore la mécanique des vélos et des trottinettes.


Pour nous, encourager la formation tout au long de la vie, c’est permettre à un sider de réaliser des missions de long terme, voire d’être recruté en CDI. Récemment, nous avons lancé, sur l’application mobile, des modules de formation avec des questions, des vidéos immersives sur des secteurs ou des métiers encore méconnus. Nous voulons continuer de développer cet axe pour élargir le champ des possibles de nos candidats !


Selon vous, quel est l’avenir des plateformes en ligne de travail comme Side qui ont, il y a quelques années, révolutionné le marché du travail en France ?


Je crois qu’une entreprise tech sur le secteur de l’emploi et du recrutement doit faire le choix d’allier humain et digital, et celui d’exercer dans le respect du droit du travail et des règles de notre marché. Depuis cinq ans, beaucoup de plateformes se sont créées et permettent à un grand nombre de personnes de travailler. Entre 2013 et 2015, les acteurs économiques, les pouvoirs publics comme les journalistes ont largement critiqué les plateformes de travail qui ne respectent pas le droit en vigueur, en le contournant.


“Avec Side, nous essayons de proposer un modèle de plateforme de travail responsable !”

Je crois que nous sommes entrés dans une nouvelle ère des services tech et des plateformes, plus respectueux des droits de tous. Cette exigence apporte une forme de crédibilité et permet aux entreprises de se développer dans la durée. Avec Side, nous encourageons ce mouvement et réalisons un travail d’éducation auprès des entreprises pour les aider à mieux suivre les règles.


Par ailleurs, l’histoire même de Side démontre cette transformation vertueuse du secteur. En effet, Side s’était d’abord lancé en tant que plateforme de mise en relation entre freelances et entreprises. En 2018, nous avons décidé de changer de modèle juridique pour devenir officiellement une “entreprise de travail temporaire”. Nous sommes très heureux de ce changement, car il apporte plus de protection aux candidats avec la possibilité de cotiser pour le chômage, de bénéficier d’une retraite pleine et d’une mutuelle. Ce statut apporte aussi une sécurité aux entreprises, qui évitent le coût d’une requalification en salariat des freelances qu’elles embauchent. En effet, les jurisprudences, en punissant certaines pratiques détournées des plateformes, ont vraiment fait bouger les lignes dans notre secteur !


“Aujourd’hui, nous ne sommes pas seuls à défendre un modèle plus responsable de régulation des plateformes de travail. C’est un grand mouvement qu’il s’agit d’encourager !”

Lien vers Side : https://www.side.co/


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