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  • Photo du rédacteurNicolas Citti

FrenchTech 2023 : Stupeur et tremblements

La grande messe annuelle du numérique éducatif s’est tenue cette semaine au Pavillon 7 de la Porte de Versailles. Se sont ainsi croisés, à l’occasion du salon Educatech Expo, l’ensemble des acteurs qui comptent dans ce secteur qui a connu au cours des dernières années un essor rapide dans l’Hexagone sous l’effet de la transformation numérique.


Ce mouvement d’accélération a également pris racine dans le mouvement de la French Tech, dont nous avons fêté récemment les dix ans. Conçu comme un écosystème de pépites tricolores, ce label est devenu une véritable marque incontournable, qui résonne au-delà des frontières. A l’image de cet oiseau bleu qui fut jadis le parangon d’un réseau social bien connu, le coq rouge est entré progressivement dans les esprits, dans les mœurs et dans le cœur des entrepreneurs.

"A l’image de cet oiseau bleu qui fut jadis le parangon d’un réseau social bien connu, le coq rouge est entré progressivement dans les esprits, dans les mœurs et dans le cœur des entrepreneurs."

Nous sommes en 2013. Fleur Pellerin, alors Ministre déléguée aux PME, à l'Innovation et à l'Economie numérique, décide de créer un nouveau label tricolore, mue par une volonté de valoriser les entreprises françaises, de créer du lien entre les acteurs techs et, surtout, de donner aux entrepreneurs les moyens nécessaires pour investir, émerger, et réussir dans la durée. Dix ans après, le résultat est bien présent. La French Tech est devenue avec le temps l’étendard de 25 000 start-ups, et peut se targuer d’avoir accompagné la création d’1,1 million d'emplois et d’importantes levées de fonds, dont un pic a été atteint à 13,5 milliards d'euros en 2022.


Toutefois, derrière cette belle réussite se cache une réalité plus nuancée. Dans un climat économique dégradé, les jeunes pousses de la tech traversent des vents mauvais depuis dix-huit mois, qui pourraient bien se transformer en tempête financière si le cap n’est pas redéfini. Dans un secteur euphorique pendant la période Covid, caractérisé par d’importantes levées de fonds et des valorisations records, l’ensemble des start-ups font face aujourd’hui à d’importantes contraintes : réductions des effectifs, rationalisation des dépenses et redressement judiciaire constituent en effet leurs nouveaux quotidiens. La situation est telle que les licornes ne sont pas épargnées, à l’instar de ManoMano, contrainte de licencier un quart de ses effectifs.

"Toutefois, derrière cette belle réussite se cache une réalité plus nuancée. Dans un climat économique dégradé, les jeunes pousses de la tech traversent des vents mauvais depuis dix-huit mois."

Ce revirement de situation s’explique aisément. Premièrement, ce secteur certes dynamique reste fragile en termes de richesse créée et d’ancrage dans le paysage économique. Bien moins résistantes que nos entreprises du CAC 40, les start-ups sont les premières touchées à la moindre contraction économique. Ensuite, l’attitude des fonds de capital-risque, entraînant les entreprises dans une logique d'accroissement à tout prix, de dépenses excessives et d’exigence de rendement de leurs participations, conduit souvent à une prise de risque bien trop importante. Enfin, face à une dette bancaire abyssale, contractée dans un contexte de taux d'intérêts très avantageux, les entrepreneurs peuvent rencontrer des difficultés à honorer leurs obligations.


S’ajoutent à ces difficultés un fort enjeu de conformité réglementaire. En effet, les dispositifs législatifs s'accumulent dans le monde de la tech - à l’instar du DSA (Digital Services Act) et du DMA (Digital Markets Act) - et prochainement des dispositions dans les domaines de l’IA et de la donnée. A ce titre, fin 2022, Hugo Weber, directeur des affaires publiques de l’entreprise Mirakl, dans une tribune publiée dans « Les Echos » tirait déjà la sonnette d’alarme : « Les start-up européennes sont confrontées à une inflation réglementaire dont il sera difficile de sortir indemne », appelant ainsi les start-ups à se doter d'une fonction “affaires publiques”.

"Face aux critiques récurrentes d’une France irréformable, manquant de réussite et d’ambition, les acteurs de la tech française ont su rivaliser avec les grands."

Par conséquent, face à ces différents constats, se dessine une situation contrastée. Certes la création d’un label dédié au secteur de la tech a considérablement propulsé la France dans le XXIe siècle, en révélant au monde qu’elle pouvait moderniser son économie, se réformer en profondeur et prendre le tournant de l’innovation. Face aux critiques récurrentes d’une France irréformable, manquant de réussite et d’ambition, les acteurs de la tech française ont su rivaliser avec les grands. Toutefois, la conjoncture économique actuelle peut considérablement ternir ce rêve tricolore, impulsé il y a maintenant dix ans. Une prise de conscience de la réalité de terrain est donc nécessaire pour résoudre les blocages, et préserver ce nouvel écosystème. Cela implique d’accompagner les start-ups face à l’inflation réglementaire européenne, et surtout de consolider à plus long terme ces entreprises, largement endettées, manquant de base solide pour maintenir à flot leurs effectifs et dégager des bénéfices nécessaires pour se développer sereinement.

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