Pour Eric Petco, Président du groupe Skill and You, la formation à distance se construit selon une pédagogie spécifique et ne se limite pas à la mise en oeuvre de classes virtuelles. Alors que le groupe propose exclusivement de la formation à distance, la crise du Covid-19 confirme les atouts du numérique en la matière.
Pourquoi avoir fait le choix de la formation en ligne ?
La formation à distance est un processus très ancien. Léon Eyrolles a été le premier à en faire en 1891 avec « L’école chez soi » qui travaillait avec la banque postale. Il y a ensuite eu l’École Universelle dans les années 1930, mais c'est l’arrivée du numérique qui a fondamentalement révolutionné l’industrie. Skill and You est un groupe qui se compose de 13 écoles différentes, dont les plus vieilles datent du XIXe siècle. Nous formons exclusivement nos 110 000 élèves à distance et pour des métiers en tension (du bâtiment, beauté, de la bouche etc.). Nous inscrivons entre 3000 et 4000 nouveaux élèves par mois, avec une moyenne d’âge qui va de 16 à 50 ans, et des typologies d’élèves très différentes. Nous utilisons différents supports pour l’apprentissage et le contrôle de nos élèves : il y a évidemment du texte, mais également de la vidéo, des quizz, des livres audios, du podcast, du drag and drop…
Trois piliers essentiels différencient la formation à distance du présentiel. En premier lieu, elle nécessite une pédagogie adaptée au fait qu’un individu se retrouve seul pour apprendre. Il faut réussir à conserver l’engagement de l’étudiant. C’est la raison pour laquelle nos formations sont séquencées, afin de permettre à l’élève d’avancer pas à pas, et surtout de mémoriser. Le second pilier c’est la technologie. Pour gérer 111 000 élèves, qui suivent chacun un parcours de formation unique, il faut disposer d’une infrastructure technologique conséquente qui fait office d’espace de stockage : ce que nous appelons le Learning Management System (LMS). Enfin, la formation à distance implique nécessairement une dimension coaching. Chez Skill and You, nous avons de grosses équipes de coach qui suivent et encouragent chacun de nos apprenants. En somme, la construction de nos formations se divisent en trois séquences : l’ingénieur pédagogique qui construit le cours, le professeur qui délivre le cours en one-to-one, et le coach qui motive l’élève. À la différence du présentiel où le professeur assure la totalité de ces fonctions…
Je suppose que cela a été un avantage comparatif énorme depuis le début du confinement ?
Le confinement nous a été globalement favorable, nous avons connu une croissance de plus de 20% depuis le mois d’avril, avec beaucoup plus d’assiduité et d’inscriptions. Le e-learning fait partie de notre ADN et il n’est pas question de passer en présentiel, encore moins depuis cette crise où soudainement toutes les écoles s’improvisent organisme de formation à distance. On ne duplique pas de la formation distancielle pour en faire du présentiel, au moyen de simples classes virtuelles.
Une chose est sûre, cette crise va démontrer que la formation à distance est un véritable outil pédagogique pour former. Jusqu’à récemment, les pouvoirs publics y étaient plutôt réticents. Il a fallu attendre 2015 pour que la formation à distance soit reconnue pour l’apprentissage. Par la force des choses, elle connaît aujourd’hui une évolution extrêmement rapide, même si beaucoup reste encore à faire. Elle n’est par exemple toujours pas reconnue sur Parcoursup !
L’autre avantage significatif de la formation à distance, c’est son prix. Au-delà du fait que la formation peut coûter jusqu’à cinq fois moins cher, elle permet aussi à des individus isolés en province d’entreprendre une formation sans avoir à déménager. Elle permet même de pouvoir se former dans des zones blanches, c’est-à-dire sans réseau internet, puisque nous avons développer une solution offline qui permet de travailler hors connexion. La croissance du mois d’avril concerne surtout la formation continue, notamment du fait de l’élargissement du dispositif FNE par le gouvernement, qui permet aux salariés en chômage partiel de bénéficier d’une formation prise en charge par l’État.
Quelles sont vos perspectives de développement à court et plus long terme ?
Nous avons récemment fait l’acquisition d’une entreprise en Espagne qui fait le même métier que nous. C’est un pays intéressant pour développer la formation à distance, car contrairement à la France où seul l’État est habilité à délivrer les diplômes, l’Espagne permet aux organismes de formations d’en faire autant. Nous sommes également en train d’ouvrir une antenne en Italie, et réfléchissons à un développement en Amérique du Sud. C’est un marché porteur qui est en pleine croissance. À titre d’exemple, Pôle-Emploi finance aujourd’hui pour la première fois des formations à distance à des métiers sous tension, ce qui n’était pas du tout envisageable il y a quelques années. Ces évolutions sont grandement dues au gouvernement actuel, qui a su redonné au salarié la pleine maîtrise de son parcours de formation, par l’intermédiaire du CPF.
Comments